le marché émergent des GIF

 

L’immatérialité est le principal problème posé par le net art. Cet art n’existe qu’en ligne à l’état numérique, à l’inverse de l’art traditionnel, physique, dont on peut calculer la valeur concrètement en mesurant les compétences mobilisées et la tangibilité finale des œuvres. On peut accrocher un tableau sur son mur, mais on ne peut pas suspendre une œuvre de net art dans son salon. Cela ne signifie pas pour autant qu’un fichier ne peut pas être considéré comme un objet de collection au même titre qu’un tableau, et le dernier projet de Kim Asendorf entend justement attribuer une valeur monétaire à des fichiers numériques pour les intégrer au circuit des collections d’art. Pour franchir cette étape décisive vers un futur où l’art en ligne serait autant collectionnable que l’art physique, il a créé GIF Market, un outil qui permet à chacun d’acheter un fichier GIF, de le conserver en ligne et d’y apposer son nom.

Les fichiers sont numérotés de 1 à 1024 et représentent une ligne noire cerclée de pixels 1×1 en rotation. Le fichier #1024 a 1024 pixels en orbite autour de lui, #1023 en a 1023 et ainsi de suite jusqu’à #1 qui a juste un pixel flottant. Le prix de chaque GIF est calculé d’après la formule suivante : PRIX = VOLUME DE VENTE / NOMBRE * 16. La vente d’un GIF fait donc mécaniquement monter le prix de tous les GIF restants, et le résultat final de ce processus (si tous les GIFs sont vendus) devrait logiquement fixer le prix du GIF #1 à 23 269 $. Un prix plutôt étonnant pour un pixel tournant. Asendorf estime que ce n’est « qu’une question de temps avant que l’art numérique, dans son format original, comme fichier, ne figure dans toute collection d’art digne de ce nom. Et le GIF sera le format de fichier le plus important ».

Cette tendance de fond est particulièrement intéressante. Récemment, les Young Internet Based Artists ont créé des plateformes numériques pour vendre et exposer leurs œuvres, sans recourir à une médiation tierce.

La catalogue Invest in Art online de Jerome Saint-Clair permet ainsi à l’internaute lambda d’agir comme mécène de l’art en ligne en aposant une pastille rouge à côté des œuvres qui l’intéressent, exactement comme dans le « vrai » monde de l’art.

Caroline