Pépites d'Art

Pépites d'art c'est l'association de six étudiantes en médiation culturelle et marché de l'art. Une volonté commune : vous faire découvrir les marchés de l'art émergents. A travers nos coups de cœurs et nos rencontres vous allez découvrir de nouvelles formes d'art, nos petites pépites.

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La bannière est un Monogold de Yves Klein. Pour lui l'or est la matière de l’échange, de la transmutation et du désir d’absolu, l’or figure à lui seul les qualités artistiques qui transfigurent un objet en œuvre d’art. L’or est promesse d’éternité.

mardi 27 décembre 2011

Interview de Fifou


Qui est Fifou ?
Fifou : Alors qui est Fifou… Je suis graphiste même si le terme employé en ce moment c’est photographiste, beaucoup de personnes se présentent ainsi. Ceci dit, en dehors des pochettes et de tout le travail que je fais dans la musique, je suis aussi dessinateur et je travaille sur de nombreux projets dans l’audiovisuel.
 Tu as intégré le milieu rap en bossant pour Radikal et Tracklist. Comment ça se passait dans le milieu de la presse ? C'était ton premier contact avec le rap ?
F : Mon premier contact avec le rap remonte à l’époque où j’étais animateur dans une radio hip-hop locale, Vallée Fm, où DJ Mars de Time Bomb avait sa propre émission. J’étais encore au lycée, donc j'observais les freestyles et les interviews avec les yeux qui brillaient [rires]. Je me souviens d'un freestyle de la Brigade et des 2Bal qui avait duré plus de 20 minutes… Je me baladais avec mon carton à dessins et mes carnets de croquis afin de leur montrer… j'étais un fan assumé [rires]
 Comment as-tu intégré ces magazines ?
F : A côté de cela, j'étudiais à mon école d’arts appliqués (ENSAAMA) et en tant qu’étudiant, il fallait que je trouve un stage. Mon pote Bob de générations m'a alors présenté à Philippe Caubit, l'ex directeur artistique du magazine Radikal. Après avoir vu mes dessins, il m'a rapidement pris en stage. A ce moment précis, je n'avais jamais touché aux logiciels Photoshop et Illustrator… Je n'avais pas de base du tout, mais malgré cela, Philippe me donnait des "devoirs" à faire [rires]. En deux mois j'ai donc appris a maquetter un magazine et surtout à manier le fameux Photoshop. Ensuite dans Radikal j'ai intégré l'équipe en dehors de mon stage puisque j'y réalisais des illustrations. Philippe Caubit étant devenu un ami, on a continué à collaborer ensemble sur son magazine "Tyler" - entre autre sur des illustrations pour des campagnes Footlocker. Puis, petit à petit, j'ai intégré d'autres équipes de presse comme celle de The Source et Tracklist. C'est là que j'ai vraiment découvert le monde de la presse…Être toujours dans le rush! [rires] Mais bon, je n'ai que des bons souvenirs de cette période. Big up a David Dancre, Leila Lkj, kiki, Nanou, et Hi-Tekk de la Caution.
"Pour moi un photographe mange et vit pour la photo. Moi je me sens plus graphiste et directeur artistique."
 Ta formation première c’est graphiste ?
F : J'ai eu la chance d'intégrer une grande école, dans laquelle j'ai pu toucher à tout : modelage, sculpture, peinture, design de produit... Mais ma formation sur "papier" est un BTS de communication visuelle. On t'apprend à réfléchir sur toute forme de communication, que ce soit en édition ou en publicité. On apprend alors le développement marketing d'un produit et sa mise en avant visuelle. L'école c'est beaucoup de théorie mais il me manquait la pratique. En dehors des cours, je travaillais déjà avec pas mal d'artistes, ce qui m'a permis d'être plus complet.
 Comment est-ce que tu t’es mis à la photo ?
F : La photo part d’une grande improvisation. J’ai toujours été attiré par la photo sans pour autant m’imaginer photographe. Ce déclic, je le dois à un ami photographe, Christophe Gstalder, de 24 ans mon ainé. Je devais avoir 20 ans, j'étais avec l'équipe de Joey Starr à l'hôtel Costes et j'ai rencontré ce gars. Son book photo était impressionnant : On passait de Enrique Iglesias à Robert de Niro, de Marcello Mastroianni à Mickey Rourke…Bluffant. J'ai alors bossé avec lui sur des directions artistiques de projets musicaux et d'édition.
 C’est une sorte de mentor pour toi ?
F : Complètement ! C'est une époque où j'étais H24 avec lui. Sa vie était à l'image de son art : folle, explosive, aérienne… Un vrai artiste. Tu ouvrais le frigo, il y avait des tonnes de pellicules photos, le salon était rempli de tirages argentiques… Je l'ai beaucoup observé et assisté durant ses shootings photos…quand je shoote aujourd'hui, je fais pratiquement les mêmes gestes que lui [rires]. C'est aussi en ayant vu tout ça que je ne me suis jamais donné le statut de photographe. Pour moi un photographe mange et vit pour la photo. Moi je me sens plus graphiste et directeur artistique.
 Est-ce que tu es passé par la case graffiti comme d’autres graphistes ?
F : J’ai traîné avec des équipes de graffeurs mais j’étais plus attiré par la peinture, c’est ça qui me faisait kiffer. J’ai plutôt une culture de BD, de mangas, de comics, que de graffiti.
 En tant qu’artiste, est-ce que tu as envie de revenir vers tes premières amours et notamment la BD ?
F : Complètement. Mais je n'ai jamais lâché cette passion. En 2006 j'ai monté avec trois associés, une société de production dans l'audiovisuel : Bazookos. Les projets y sont divers et variés mais ont tout un point commun : le dessin. C'est un travail d'acharnés mais excitant. On prépare quatre gros projets d'animation, en partenariat avec d'autres boites de prod et chaines TV. Le plus connu et plus vieux de mes projets est Baby HipHop, crée avec mon ami Clark en 2005. On travaille sur la série et un nouvel album international. 2011 va être rempli d'aller-retours aux US [rires].
Sinon le projet le plus abouti que je prépare est un livre d'illustrations sur l'univers du Gangsta Rap Californien : Comptoonz. Ce livre co-créé avec Chino Brown verra le jour en 2011.
Tu n’as que 27 ans et tu as un book déjà bien rempli en tant que graphiste. Quelles ont été les étapes déterminantes dans ta carrière ?
F : La presse a été vraiment importante parce que cela m’a appris à penser dans l’urgence. C’est un milieu où tu as beaucoup de contraintes, c’est un gros bazar mais c’est un bel apprentissage. Il faut que tu bosses dans l’urgence avec peu de moyens. Surtout dans la presse Hip-Hop hop où les budgets ne sont pas les mêmes que quand tu bosses pour un magazine de mode. Après, l’opportunité de faire les pochettes d’artistes importants m’a propulsé. La pochette du premier album de Lino qui sortait chez EMI m’a permis de rentrer dans le réseau maison de disques et surtout d’être exposé. On ne me connaissait pas forcément avant ça. L’album de Lino et "Illicite projet" sont vraiment les deux disques qui ont donné une autre dimension à ma carrière. Même si "Illicite projet" n’a pas eu les résultats escomptés, ça a fait pas mal de bruit et l’image avait été bien travaillée. Je n’avais pas fait les photos mais c’est moi qui les avait retouchées, qui avaient fait des montages, qui les avaient découpées etc. Ce sont mes deux premières grosses références dans le rap.
 Comment un illustrateur chez Radikal se retrouve à faire la pochette du Lino ?
F : C'était une évolution logique pour ma part. J'étais un passionné d'images et à Radikal j'ai vraiment appris à maitriser les logiciels d'infographie. Et puis à cette époque, je voyais débouler les groupes de rap au service presse du magazine. Donc de fil en aiguille, j'ai commencé à travailler pour des indépendants sur des logos et flyers. Dans ce microcosme qu'est le rap, si tu es motivé et créatif on peut te tester sur une pochette rapidement. Ma première pochette officielle était celle de Princess Aniès…vu que je ne faisais pas de photo, le livret ainsi que la cover étaient entièrement dessinés. Une fois le pied dans ce "game", je suis devenu accroc, et j'ai eu cette chance de travailler avec Lino assez vite.
"Je suis assez critique envers mon travail. Je dois faire un site aujourd’hui mais, pour moi, il n’y a rien à mettre dedans."
A : Avec le recul, quel regard tu portes sur tes premiers travaux ? Est-ce qu’il y a des choses que tu considères comme des ratages a posteriori ?
F : Je suis assez critique envers mon travail. Par exemple, je dois faire un site aujourd’hui mais, pour moi, il n’y a rien à mettre dedans. Finalement, je ne suis pas satisfait de ce que j’ai fait. On est dans une performance quotidienne et, à mon sens, ce que j’ai fait il y a un mois est déjà dépassé. Au départ, je bossais pas mal à l’arrache et je trouve que mes premières photos étaient floues, mal étalonnées… Mes ratages étaient surtout photographiques, n'ayant pas reçu de formation professionnelle dans ce domaine. Ensuite, quand tu bosses avec des clients, tu réponds aussi à une demande. Tu ne fais pas forcément ce que tu veux, surtout quand tu es en maison de disques… 
Par exemple, tu peux te retrouver face à un mec qui n’aime pas poser. Tu vas alors être obligé de te démerder pour pondre quelque chose qui convienne même si ça ne rentre pas dans tes plans initiaux. Au final, il y a plein de pochettes que j’ai faites dont je ne suis pas forcément fan. Attention, il y en a plusieurs que j’aime également ! En tout cas, tant que je n’aurai pas une totale liberté, je ne serai pas vraiment satisfait.
A : Quel est ton meilleur souvenir ?
F : [Il hésite] Il y a eu le travail sur l’album de Mokobé, le premier album de la Fouine… Tout le travail autour de Booba avec qui je me suis vraiment éclaté en terme de création. B2O m'a toujours guidé tout en laissant libre court à mon imagination. Sur les campagnes Unkut, j'ai vraiment de bons souvenirs "photoshopiens" [rires].
 Justement, je voulais revenir sur "0.9" qui a un très joli livret mais dont la pochette a beaucoup fait parler. Les précédentes pochettes de Booba avaient souvent un double sens et celle-ci n’a pas été très bien comprise par le public… Où est-ce que vous avez réellement voulu aller ?
F : Je t'avoue que je me suis fait pas mal allumé sur cette cover [rires]. Les gens s'attendaient au grain Fifou, avec des montages de partout, des effets de flairs que l'on retrouve partout… Mais avec Booba, on ne voulait faire que de la photo pure, sans forcément d'effets photoshop. On s'était déjà bien lâché graphiquement sur ses campagnes et on a donc pris le parti de réaliser une pochette épurée et simple. Mais comme je te l’ai dit, tu n’as pas forcément le veto pour dire "c’est ça et rien d’autre". C’est quand tu bosses avec des indépendants que tu as le plus de libertés. Prends quelqu’un comme Chris Macari. On lui a souvent reproché d’avoir réalisé des clips beaucoup plus forts pour des mecs ghetto que ceux réalisés pour des rappeurs plus établis. C’est sûrement dû au fait qu’il ne jouissait pas de la même liberté et je le comprends complètement.

Est-ce qu’Internet t’a aidé à percer et à te faire des contacts ?
F : Ca fait longtemps que je suis dans le rap et j’ai un réseau qui est déjà assez large. Dailleurs, comme tu as pu le remarquer je n'ai même pas le temps de faire mon site [rires]. Généralement, les rappeurs ne passent pas par Facebook mais me contactent directement. Il y a des clients qui passent chez moi et laissent du courrier dans la boîte aux lettres [rires]. Aujourd’hui, Facebook m’offre un autre réseau mais ça concerne davantage le cinéma, des graphistes ou des chefs d’entreprise que le rap.
A : Je sais que tu as été amené à travailler sur le visuel de "L’arnacoeur", le dernier film de Romain Duris et Vanessa Paradis. Comment es-tu arrivé sur ce gros projet ?
F : Déjà, j’ai toujours eu l’ambition d’élargir mon champ de compétences et d’aller voir ailleurs. Clairement, je ne m’imagine pas cantonné aux pochettes à cinquante ans. C’est cool, tu peux vraiment t’éclater sur le plan artistique mais c’est comme un mec qui fait des clips: il voudra toucher au long métrage à un moment donné. C’est la même chose pour moi, j’ai envie d’aller explorer d’autres univers. Les affiches de film m’ont inspiré pour plusieurs pochettes. D’ailleurs, la plupart des rappeurs ont des références cinématographiques quand ils viennent te voir. Le problème c’est qu’en France, quand tu bosses avec les rappeurs, c’est un peu compliqué d’aller se revendre ailleurs. Je pense que des gens comme Armen ou Koria doivent rencontrer le même problème. Il y a de grosses barrières dans le cinéma français. Le fait de travailler dans l'urbain peut bloquer avec certains milieux. 
Pour en revenir à "L’arnacoeur", je n’ai jamais démarché personne. J'étais avec mon ami David Danési, le patron de Digital District qui m'a mis en contact avec le réalisateur Pascal Chaumeil et Nicolas Duval, patron de Quad. Je ne m'attendais pas à rencontrer autant de personnalités lors de mon premier rendez vous avec eux. Ils m'ont projeté le film dans une mini salle de visionnage très cosy de leurs bureaux. Le briefing fut rapide : de gros enjeux économiques étaient investis et j'avais peu de temps pour réaliser l'affiche. Grosse pression donc et surtout pour une première. De plus, avant de les quitter, on m'apprend que c'est Monsieur Mondino qui avait réalisé le shooting lors de la première séance (non validée pour l'affiche)… Ca m'a mis encore plus de pression sur les épaules. Mais au final, tout s'est bien déroulé et le film a explosé le box-office.
"Pour "L'Arnacoeur", le briefing fut rapide : de gros enjeux économiques étaient investis et j'avais peu de temps pour réaliser l'affiche."
A : Quelles différences vois-tu entre l’industrie du disque et celle du cinéma ?
F : La grosse différence c’est qu’il y a énormément de paperasse dans le cinéma, surtout quand c’est un gros film. Et forcément les budgets n'ont rien à voir avec la musique. C’est également un univers qui est très codifié. Là il s’agit d’un gros film qui marque le retour de Vanessa Paradis, c’est une grosse comédie française… Généralement, les affiches de comédies françaises ont toujours les mêmes codes couleurs. Le souci avec ces gros films c’est que tu dois plaire au réalisateur, aux acteurs, aux producteurs, au public… A tout le monde ! Tu as quinze personnes devant toi qui vont juger ton travail. J’ai fait un gros travail pour le film mais qui a quand même été recalibré par derrière : les couleurs ont été changées, la typo est devenue super basique parce que la mienne était trop compliquée…
Bon, je n’ai jamais bossé avec Jay-Z et il se peut que ça soit le même délire mais, dans la musique, je n’avais jamais été confronté à ça. Généralement, les maisons de disques font quand même confiance à l’artiste, surtout quand il s’agit de Booba par exemple. Si ce que je fais plait à Booba, c’est réglé. En même temps, ça m’a permis d’apprendre et de me frotter à un autre milieu.




 Si des opportunités se présentent, j’imagine que tu aurais envie de continuer à creuser dans ce milieu…
F : Ouais, j’ai envie de m’y mettre à fond, cette expérience m'a vraiment motivée. Aujourd’hui, quand je bosse sur une affiche de cinéma, je ressens les mêmes vibrations que lorsque je commençais mes premières pochettes. Il y a une étincelle, ça m’inspire ! Et voir son affiche partout dans la France et le monde est une sensation terrible!
 On a interviewé Armen il y a peu qui nous disait qu’il avait surtout envie de bosser sur la réalisation de clips aujourd’hui, notamment aux États-Unis. Est-ce que c’est quelque chose qui te tente ?
F : Oui bien sûr. Avec la technologie d'aujourd'hui, il y a vraiment matière à s'éclater en vidéo. Pour moi, c'est une évolution logique pour un directeur artistique ou photographe. Mais j'ai besoin d'apprendre aussi bien en photo qu'en vidéo pour vraiment me lancer dedans. Petit à petit...

Est-ce que la musique de l’artiste intervient dans la création de la pochette ? Par exemple, quand tu fais la pochette de l’album de Lino, est-ce que tu as écouté l’album avant ou ça vient juste d’une demande de sa part ou d’une de tes idées personnelles ?
F : Je n’ai pas réellement besoin d’écouter l’album pour livrer une pochette sauf quand le MC a vraiment un univers particulier. C’était le cas avec Despo pour lequel on a livré un très gros travail. Déjà, je ne suis pas proche de tous les rappeurs avec qui je bosse mais Despo est devenu un ami. On a beaucoup discuté en amont, j’ai écouté sa musique et on a essayé de sortir quelque chose qui corresponde à son univers. Après, je n’ai pas le temps d’écouter tous les albums compte tenu de la quantité de projets que je fais. Quand je travaille sur un projet, j'ai besoin d'avoir une dose de mystère sur un artiste, pour pouvoir intervenir avec plus d'objectivité sur son artwork.
 Tu es donc une des rares personnes qui a écouté l’album de Despo… [NDLR : l’interview a été réalisée avant la sortie de l’album]
F : Ouais et, honnêtement, ça faisait longtemps que je n’avais pas écouté du gros rap comme ça. C’est une tuerie. D’ailleurs, j’aime bien l’état du rap français aujourd’hui. Il y a énormément de rappeurs et de compétition mais du coup, tu es obligé de te démarquer quand tu sors un projet. Il faut que tu sois fort. Les nouveaux albums que j’ai entendus démontent. Que ça soit le Despo ou le Nessbeal, ce sont des putains d’album. C’est pour ça aussi que je reste dans le rap français et que ça m’intéresse toujours. La nouvelle école du rap français me motive aussi… Des artistes tels que Still Fresh et Dosseh sont à surveiller de près.
 Tu disais justement que certains rappeurs français avaient tendance à avoir des pochettes super ressemblantes les unes par rapport aux autres. Est-ce que tu les trouves frileux en termes d’image ?
F : Pour beaucoup de rappeurs, leur taf se limite à rapper. Finalement, ils ne s’intéressent pas vraiment à l’image. Ça n’est pas de la frilosité mais plutôt un manque de créativité. Au final, ils ne veulent que de belles photos et se ramènent tous avec les mêmes lunettes, le même délire Louis Vuitton et les mêmes références. La plupart du temps, les groupes qui viennent me voir me demandent toujours la même chose et n’osent pas vraiment partir dans de nouveaux délires. Je pense que c’est d’abord une question de culture. Il y a quand même des groupes qui sont venus me voir et qui ont une passion de l’image, qui collectionnent des photos etc. Ça reste cependant une minorité. C’est pour ça que si tu me demandes ma pochette préférée, je choisirais sûrement une pochette super épurée avec une typo clean qu’on voit à peine. Mais les rappeurs ne me demandent pas ça généralement [sourire].

 Est-ce qu’on peut parler chiffres et évoquer le budget requis pour avoir une pochette de Fifou aujourd’hui ? Est-ce que c’est le même budget pour tout le monde ?
F : En règle générale, une pochette en indépendant ira de 1 000 à 1 500 euro tout compris. En maison de disque, ça commence à 5 000 et ça peut aller jusqu'à 10 000 euros. Dans le cinéma, les chiffres n’ont rien à voir puisque tu vas prendre avec une affiche l’équivalent de quatre pochettes de disques. Ça paye bien !
 Est-ce qu’il y a un motif autre que financier qui pourrait t’empêcher de réaliser une pochette ?
F : Je travaille beaucoup au feeling. Je considère mon travail comme une chance, donc j'aime bosser avec tout le monde, je ne snobe pas du tout. Cependant, j'aime triper humainement avec mes clients. S'ils sont distants ou pédants, je ne travaillerai pas avec eux. En tant que photographe, certains détails peuvent aussi me bloquer. Si mon client ne dégage rien physiquement, j'aurai du mal à faire quelque chose de puissant. Avoir des statues sans feeling face à mon objectif ne me booste pas trop.
 Est-ce qu’il y a des pochettes de rap ou des affiches de film qui t’ont vraiment marqué ?
F : Plusieurs mêmes! J'ai adoré le travail de Wahib avec la Mfia K'1 Fry et ses couvertures du magazine The Score. Sinon mes références sont rarement Hip-Hop. Je puise mes inspirations dans l'univers de la mode et du cinéma. Les visuels des séries américaines sont explosifs! J'hallucine sur les concepts des affiches des "Soprano", "The Wire" ou "Dexter". Dernièrement, en affiche, je suis resté bloqué sur les créas de l'affiche "Inglorious Bastard" de Tarentino. Tous les univers m'inspirent, je m'intéresse de plus en plus au travail incroyable du graphiste So-Me de Ed-Banger.
 Pour revenir un peu sur quelques-unes de tes créations, comment en êtes-vous arrivés à créer la pochette et le livret de "Paradis assassiné" de Lino ?
F : A cette époque-là, j’étais un petit puceau et c’était un rêve de fou de pouvoir bosser avec Lino. Il fait partie de ces rappeurs qui bouffent énormément de films, qui bouquinent 24H/24, qui regardent tout ce qui se passe sur Internet… Il est arrivé en me ramenant des affiches de film et des idées de photos. Ensuite, on a beaucoup bossé au feeling. Par exemple, on a fait la photo Punisher et, d’un coup, il me dit "Viens, on va mettre des cadavres autour !" Il ne s’agit pas de pochettes dessinées au préalable. On avait posé un univers au départ mais qui a évolué au fur et à mesure. Lino est un vrai kiffeur de l’image et c’était un plaisir de bosser avec lui. C’est un des rares avec qui j’ai vraiment pris mon pied graphiquement.

Parmi les autres pochettes que j’apprécie, il y a "Rimes passionnelles" de Stomy qui était très soignée. Comment en êtes-vous arrivé à ce délire ?
F : A cette époque-là, Stomy avait changé de mode de vie dans le sens où il était déjà acteur et avait fait de nombreux films. Quand je suis allé le voir, je ne voulais pas faire une photo de lui avec un bandana même si c’est le Stomy qu’on connaît. Je voulais vraiment mélanger le côté classe et caillera. J’ai pensé à cette pochette comme une peinture, notamment la photo dans la chambre d’hôtel où on voit une femme allongée sur le lit. Ça correspondait à l’image qu’on avait de Stomy mais ça n’envoyait pas le même message qu’une pochette de Ice-T avec des gros nibards partout. Ici, il y avait un côté plus poétique. Ce qui était bien c’est que Stomy est très bon client face à l’objectif, qu’il aime poser et qu’il m’a laissé prendre mon temps. Il m’avait aussi donné carte blanche pour ce projet.
 Je sais que tu as également travaillé avec Princess Aniès. Est-ce qu’il y a des codes différents en termes d’image quand tu bosses avec une femme ?
F : Les codes sont les mêmes mais cela se travaille différemment. Dans le rap c'est plus difficile pour une femme…Elle est soit classée dans le rap de bonhomme, soit dans ce côté bitch provocatrice à la Lil Kim. Ensuite niveau préparation d'un shooting il y a beaucoup plus d'intervenants. Contrairement aux mecs, une rappeuse doit avoir une maquilleuse, une coiffeuse et un styliste. C’est sûr qu’il y a beaucoup plus de préparation pour une fille que pour un mec. Quand tu as six heures de studio avec Sheryfa Luna, il y a deux heures qui sautent pour le maquillage.
 J’ai vu que tu avais fait la pochette de "Un homme nature" de Gyneco. Comment s’était passée cette collaboration ?
F : A l’époque, j’avais pas mal bossé avec un label canadien qui s’était implanté en France sur lequel il y avait Papillon et les Sales Gosses. Même si eux étaient en beef avec lui, on m’a contacté pour retoucher la pochette de Gyneco. Il faut savoir qu’à sa grande époque, Gyneco était le rappeur que je voulais shooter à tout prix, au même plan que des NTM ou IAM. Quand je l’ai rencontré, il était encore dans le rap mais il était déjà ailleurs. On n’a pas vraiment échangé, je n’avais même pas écouté l’album…Je commençais déjà à bosser avec des gens comme Mac Tyer et quand je lui montrais ce que la nouvelle école faisait, cela ne lui parlait plus du tout. Je me rappelle d'un gars tranquille et posé mais plus trop impliqué dans sa musique.

 Tu es passé de pochettes très esthétiques à des travaux beaucoup plus street. Comment se fait la transition ?
F : Pour moi, c’est quelque chose de purement Hip-Hop. Il y a des projets où le rendu doit être "crasseux". Je ne dis pas ça péjorativement et ça ne signifie pas que ça doit être bâclé mais le contenu du disque t’oriente vers ça. En plus, il s’agit souvent de projets sur lesquels il y a moins de moyens. Mais c’est la même chose aux Etats-Unis ou le visuel d’une mixtape n’a rien à voir avec celui d’un album. Parfois, les mecs viennent me voir et veulent un truc caillera, super simple. Je vais le finir en deux heures de temps. Par exemple, je bosse avec Escobar Macson qui prépare deux projets en même temps. Un street sur lequel le visuel sera super caillera, super simple. De l’autre côté, il prépare son album pour lequel on a bossé la pochette sur trois mois et on s’est vraiment pris la tête. Les deux sont cohérents et représentent une facette d’Escobar. Ça m’éclate de différencier deux types de pochettes.
 Pour revenir un peu sur ton actualité à venir, tu me disais que tu avais ces quatre projets des dessins animés. Est-ce que tu peux rentrer un peu plus dans le détail et nous dire de quoi il s’agira ?
F : Actuellement avec mon équipe, on travaille sur une série courte appelée "Moniz". Le principe est d'animer des billets de banques qui parlent entre eux de l'économie actuelle sur un ton moqueur et sarcastique. Une sorte de brèves de comptoirs entre différents billets qui se retrouvent au fond d'une poche. Je m'occupe de la création des personnages ainsi que de la bible graphique, et le scénariste Clark travaille sur leurs mises en scène et dialogues. En parallèle, comme je le disais plus haut, on travaille sur le projet Baby Hip-Hop afin de l'implanter sur le territoire US. Ce projet est plus complexe, car il est très large. On réfléchit sur la gamme textile pour enfant, sur le prochain album, et sur tous les dérivés du projet. Pour les autres projets, on met en place un collectif du nom de Fish High, dans lequel on pourra produire des documentaires, des projets d'éditions et de communication visuelle. Le but étant de travailler avec de nouveaux talents et surtout de s'éclater à plusieurs.

mardi 20 décembre 2011

Artoyz, un nouveau genre

Objets décoratifs de collection pour adultes :
«  Parce que nous sommes tous des enfants »

Les « Art Toys » ou aussi appelés « Designer Toys » sont de charmantes petites figurines en édition limitée. Ils sont apparus vers la fin des années 90 à Hong-Kong et au Japon, sous l’impulsion d’artistes tels que Michael Lau, Kaws, Futura 2000 ou encore James Jarvis.

Ces figurines sont aussi variées et différentes que les univers d’art contemporain existant. C’est ainsi, que chacun à leurs façons, graffeur, artiste du street art, de l’illustration, de la bande dessinée, ou la mode, investissent la plupart des supports possibles pour s’approprier ce jouet.

Souvent de plastique vinyle rotocasté, ils peuvent être composés de bois aussi, céramique, métal, ou encore en polyester. Leur particularité étant le faite qu’ils sont parfois vendues vierges de tout graphisme, dits « à customiser », c’est alors à l’acquéreur de les peindre lui même ! Pour cela il vous faudra un soupçon de talent, d’imagination, quelques feutres, bombes, autocollants, etc.
Inspirez-vous de Frank Kozik, artiste, qui n'en fini plus, de décliner son animal fétiche, le lapin fumeur ! Petit, moyen, ou géant au point de s'en servir d'assise, c'est une famille nombreuse qui a vu le jour en moins de 10 ans.



Ubisoft présentera son tout nouveau Designer Toy personnalisable en vinyle dénommé « Do It Yourself » EEERZ, inspiré par les Lapins Crétins, lors d’une exposition inédite chez Artoyz qui aura lieu du 26 Janvier au 25 Février 2012. Pour l’occasion, de nombreux artistes se sont prêtés au jeu et ont laissé libre cours à leur imagination en dessinant.

Liens utiles : - Artoyz.com


Sarah

mardi 13 décembre 2011

Saga Street Art [ troisième partie : TAG Gand Palais ]

Alain-Dominique Gallizia a exposé au Grand Palais en 2009. Il a regroupé grâce à son projet 300 œuvres dans sa collection de 150 artistes internationaux issus du Street Art, en fonction de 4 conditions :
  • Le format (format panoramique de 60 cm sur 2 x 180)
  • le thème imposé, pour une des deux parties de la toile qui fût dans ce cas précis l’Amour.
  • Un lieu de travail commun (l’atelier de Gallizia)
  • Un délai de réalisation de 3 jours. 

A-D Gallizia, fasciné par les graffitis qui l’entouraient, eu l’envie de faire passer cet art qualifié habituellement d’éphémère, à la lumière du grand public.
"Le principe de cette collection, c'est que je n'ai acquis aucune œuvre de ces artistes. Je n'ai pas cherché à acheter l'art, mais à le créer. C'est donc avant tout une rencontre, le choix d'un artiste. En discutant, nous nous sommes mis d'accord sur. Il se trouve pour des raisons techniques très importantes qu’il a fallu les couper en deux. Les toiles ne rentraient pas dans ma Smart."
Malgré quelques difficultés dû aux conditions de réalisations des oeuvres, Gallizia a su rallier à sa cause parmis les plus grands graffeurs tels que Taki, JonOne, Psyckoze, Crash, Staynight 149, Bando, Jay One..en un mix de générations et de continents.

JAY ONE



TAG au Grand Palais
Chloé

samedi 10 décembre 2011

Castelbajac, quand mode rime avec art


Retour en image sur Castelbajac, un créateur un peu fou qui reste passionné par le monde de l'enfance et du ludique. Il pratique le détournement et l'appropriation pour provoquer le questionnement. Après plusieurs expositions en France et à l'internationale Castelbajac n'est plus considéré comme un styliste mais un créateur, un artiste à part entière. Il a gravit peu à peu les échelons de la notoriété internationale et désormais sa patte est connue de tous. Il a su adapter son univers stylistique à une certaine forme d'art qui est lui est propre. A suivre une série de photographies pour vous donnez, je l'espère, l'envie de mieux connaître son œuvre.
« J’ai envie de susciter l’émerveillement, de provoquer sans choquer » 

portrait détourné à l'occasion de l'exposition The Tyranny of beauty

Tapisserie Flamande détournée
Exposition Galerie Think & More
Castelbajac à plus d'une corde à son arc puisqu'il est aussi designer. Ses créations content le parcours d’un poète du nouveau siècle aux influences diverses et offrent un monde en couleurs et en formes, joyeux et un brin décalé.


Si vous voulez faire plus ample connaissance avec le créateur rendez-vous sur son site web : ici

Caroline

mardi 6 décembre 2011

Yayoi Kusama , une artiste atypique

J’ai toujours aimé l’idée d’une rétrospective, cela permet d’analyser l’évolution de l’artiste, de son œuvre, de mieux s’en imprégner. J’étais donc pressé de voir le travail de cette artiste singulière, qui développe depuis 60 ans une carrière obsessionnelle à travers la répétition de motifs dans ces œuvres.
 

I’m Here, but nothing (2000-2011)
L’installation d’ouverture, nous plonge directement dans le monde de Kusama. Une salle à manger où des petits de pois de toutes les couleurs, collés partout, nous accueillent et donnent l’illusion de briller dans la pénombre.
« Ma vie est un pois perdu parmi des milliers d’autres pois » écrit Kusama en 1959

C’est donc une balade à travers 150 œuvres réalisées entre 1949 et 2011 qui attends le visiteur. Hypersensible, l’artiste s’est nourrie de nombreuses influences, en poursuivant son chemin à sa façon. A savoir qu’elle a choisi de vivre parfois dans un institut psychiatrique depuis 1977, et cela se ressent dans sa créativité.

Constitué essentiellement de tableaux, la première partie de l’exposition me laisse perplexe. Arrivé aux installations, on y retrouve son univers, ses environnements infinis, où la répétition hypnotique des formes nous plonge ailleurs en quelques instants en perdant ses repères. Yayoi Kusama, présente ses pois comme une hallucination : « J’ai vu les premiers à l’âge de dix ans et je continue à en voir encore »

Yayoi Kusama, "Dots Obsession, Infinity Mirrored Room", 1998 - Obsession Pois/points. Salle des Reflets Infinis - Installation. Peinture, miroirs, ballons, adhésifs, hélium - 280 x 600 x 600 cm - Les Abattoirs Toulouse ©Jean-Luc Auriol
 






Yayoi Kusama, Centre Pompidou, Paris 4e, Galerie Sud, niveau 1
Tous les jours sauf le mardi, 11h-21h, nocturnes le jeudi jusqu’à 23h
Tarifs : 12€ / 9€, gratuit pour les moins de 18 ans

Sarah

dimanche 4 décembre 2011

Entretien avec un graffeur du Many Vectorz

Qu’est ce que le Many'Vectorz ? 
Graff de Yakone du Many Vectorz
 
Le Many'Vectorz, c'est un collectif rassemblant des producteurs musicaux, des rappeurs, des graffeurs, graphistes, photographes, cameraman et monteurs...etc.! Tous de référence urbaine ! C'est un collectif totalement autonome. Si un rappeur sort un son, les productions, clip, jaquette de disque, promo etc.. se font totalement en interne.

Comment as-tu intégré ce milieu ? (Le collectif Many'Vectorz et le  Hiphop)

Le Hip'hop- j'y beigne depuis tout petit, mes parents me promenaient souvent vers Châtelet les halles. J'en revenais chaque fois traumatisé. Many'vetorz en traînant de soirée en soirée, d'amis en amis, tout s'est fait naturellement on s'est vite rendu compte de  nos intérêts communs et que l'on se complétait tous..

Ta formation première c’est "graphiste" ?

Pas vraiment, je suis graphiste en effet, mais je n'ai pas vraiment fait d'études, avant de faire ce métier j'étais carrossier peintre, c'est le graffiti qui m'a amené à ce travail ! La facilitée de marier les couleurs, les proportions déborder d'imagination... sont des qualités pour ce métier, et de nos jours  les diplômes importe peu.

Comment t'es tu mis aux graff ?

Je dessine et beigne dans le hip hop depuis tout petit, j'ai fait mes premiers tag à l'âge de 9ans, en même temps je dessinais toujours autant, et je me suis mis a reproduire les graff que je voyais sur les voies ferrés ! Vers 15-16 ans je me suis mis à faire des graffitis plus sérieusement, plus travaillés et colorés, à faire des personnages, des décors..Aujourd’hui j'ai 27ans et toujours la même envie d'évoluer et passer des bons moments à peindre avec mes amis et voyager pour rencontrer d'autre personnes et cultures artistiques...

As-tu une sorte de mentor ?

Oui, plusieurs références.. comme les P19, MAC pour leur qualité de peinture en groupe et la cohérence de leurs fresques.., et ensuite chacun pour leur style et qualité de peinture, Zest, Brok, Sade, Reso, Tact... tous devenus des amis à présent.

En tant qu’artiste, est-ce que le graff est ton seul grand amour ?

J'ai rencontré le graffiti vers 9ans.. j'en ai 27 aujourd'hui. J'en ai toujours autant besoin.. donc on peu dire que c'est un de mes plus grand amour...! Faudrait me couper les main pour que j'arrête. 

Avec le recul, quel regard tu portes sur tes premiers travaux ? Est-ce qu’il y a des choses que tu considères comme des ratages à posteriori ?

Oui, certain dont j'ai honte maintenant.. mais ça fait parti de mon parcours, on fait tous des erreurs et ça nous sert de leçon, je sais maintenant que je ne ferai plus ce mélange de couleur, cette forme de lettre, etc.

Quel est ton meilleur souvenir ?

Une session graffiti sauvage à Amsterdam avec des amis, en pleine journée dans une ville qui comporte des caméras à chaque coin de rue, on a retourné la ville, notamment le quartier rouge et l'intérieur d'un coffee shop de tag et graffiti sauvage.. et sans se faire arrêter..!!! Je ne sais pas si on a eu beaucoup de chance, ou si c'était férié !

Est-ce qu’Internet t’a aidé à percer et à te faire des contacts ?

Pas vraiment, ça m'a peut-être permis de me faire connaître un peu plus, mais la plupart des gens avec qui je peints ou que j'ai rencontré, s'est fait naturellement, dans des soirées, ou des murs communs avec des amis. Je ne peins pas avec une personne parce qu'elle peint bien, il faut d'abord que le courant passe.. qu'il y ai un véritable échange, sinon il n'y a pas d'intérêt à mon goût!

Pour en prendre plein les yeux, je vous invite à visiter la galerie flickr de Yakone : ici




Carla

vendredi 2 décembre 2011

Saga Street Art : [ deuxième partie : Banksy ]

Le Street art a donc désormais ses « stars » dans le milieu, dont un qui surpasse tous les autres, Banksy.


Célébré par les plus grands du monde de l’art, Banksy est aujourd’hui le représentant le plus influent, le plus provocateur et le plus stimulant du Street art. Sa capacité à aborder la rue comme une toile sur laquelle il projette ses opinions anti-guerre, anticapitalisme, et plus généralement anti-ordre établi, n’a encore jamais été égalé. C’est par sa maîtrise technique des pochoirs liant textes et images, par l’humour visuel de ses pièces satiriques et l’émotion avec laquelle il prend partit aux situations politique, qu’il a su imposer le Street art comme la forme artistique la plus essentielle de notre époque. Le bristol Museum lui a même consacré une exposition en juin 2009 intitulé « Banksy vs Bristol Museum ».

 « Les artistes font disparaître le mur »

Il accroche au Louvre une toile reproduisant Mona Lisa avec un smiley, customise des albums de Paris Hilton. Banksy est considéré comme LE représentant du Street art de nos jours, et le mouvement artistique lui doit  une fière chandelle : il a beaucoup aidé à améliorer l’opinion publique sur les graffitis : « C’est du vandalisme » « Ce n’est pas de l’art » ou encore « Ce ne sont que des gribouillis ».


La série de graffitis réalisés sur le mur de la banque de Gaza, s’inscrivant dans son projet Santa’s Ghetto ; donne instantannément au Street art une dimension contestataire et internationale.  Les graffitis comme les graffeurs, sont tous très différents les uns des autres ; ils n’aspirent pas aux même buts, mais désirent tous être reconnus. Aujourd’hui, Le street Art peut être considéré comme un Art engagé (cf : graffs mur de la banque de Gaza ou « What are you looking at ? »)  et non comme du simple vandalisme.

Le film « Faites le mur ! » sorti en 2010 raconte l’histoire des maîtres du Street Art à travers un documentariste français. (petit lien cliquable sur "faites le mur !" du DVD sur amazon)



Chloé

Andreas Gursky : La photo la plus chère au monde.

Rhein II
« Rhein II », 1999, 185,4 x 363,5 cm. Le tirage qui a été vendu est le premier d’une série de six. Andreas Gursky
 
La photographie de l'artiste allemand Andreas Gursky, intitulée « Rhein II », a été vendue à 4,34 millions de dollars (3,1 millions d'euros), lors d'une séance de vente aux enchères qui a eu lieu le 10 novembre chez Christie's à New York, ce qui en fait la photographie la plus chère du monde.
Réalisée en 1999, l'œuvre « Rhein II » illustre un paysage des rives du Rhin au moyen de lignes parallèles composant le chemin, le fleuve, le gazon et l'horizon. Grâce aux techniques de retouche, le photographe a effacé une usine située au bord du fleuve pour rendre l'image plus simple et plus forte.
« Je me fous des paysages ordinaires du Rhin. Ce qui m'intéresse ce sont les paysages les plus modernes »
  Cette somme astronomique en fait la photo la plus chère du monde. Cette photographie détrône le précédent record ­enregistré le 11 mai 2011, par un ­autoportrait de Cindy Sherman, daté de 1982 et intitulé « # 96 », vendu, pour la somme de 3,89 millions de dollars (2,85 millions d’euros). Andreas Gursky n'en est pas à son coup d'essai puisque, en février 2007, sa photographie « 99 Cent II Diptychon », réalisée en 1999, avait été adjugée 3,35 millions de dollars (2,46 millions d’euros) c'était à l'époque la photographie la plus chère au monde.

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Pour comprendre le pourquoi du comment de ce prix je vous invite à aller lire l'interview de Pierre Cornette de Saint Cyr qui est commissaire priseur et président du Palais de Tokyo.

Caroline

jeudi 1 décembre 2011

Saga Street Art [ première partie ]

           Les marchés de l’art s’affolent : Le Street a désormais sa place !

L’Urban Art, Récemment rebaptisé street art, l'art urbain est un mouvement artistique qui se veut autonome, et que l’on associe le plus souvent aux tags, et aux graffitis. Qu’en est-il aujourd’hui ? Comment ses artistes se sont-ils imposés comme tels ? Du « vandalisme » aux grandes maisons de ventes, dans les galeries, et même dans les musées.
" Il ne s'agit plus simplement de graffiti mais d'un art urbain au sens large. Désormais, les artistes mettent en scène et s'inspirent de la rue. " Patricia Dorfmann

En une quarantaine d’années, et surtout depuis la fin des années 90, de nombreux artistes ont pu s’affirmer faisant même oublier le contexte social dans lequel le Street art fût né.  Shepard Fairey aux Etats-Unis, Banksy en Angleterre, Blu en Italie, Influenza aux Pays Bas, de Akayism en Suède. Le Graffiti à mondialement la cote : on le retrouve aujourd’hui dans les grandes salles de vente et les galeries d’art, bien loin de son contexte d’origine : les rues populaires de New York.  Il a pour principaux fondateurs Zlotykamien, Daniel Buren, Ernest Pignon-Ernest puis ceux qui les suivirent, tel que Miss.Tic, Blek le rat ou Jérôme Mesnager.

Jerôme Mesnager
 « Et ça ne fait que commencer. Le Street art va devenir plus planétaire qu’aucun autre mouvement artistique avant lui. » Blek le rat
Le marché de l'art en prend un coup, et le street art, l'un des seuls domaines de création dont la cote soit en hausse malgré la crise, envahit les grandes salles de ventes, comme Artcurial en décembre 2008. La vente disposait à peu près d’une centaine d’œuvres, généralement à des prix plus abordables que ceux de l’Art contemporain (la moyenne c’était établis à 3000€). Il y eut également  une vente chez Million & Associés peu de temps après. Aujourd'hui, en France, de nombreuses galeries d'art consacrent des expositions entières au street art (ou urban art), comme la galerie Magda Danysz à Paris, qui représente aujourd’hui les artistes américains West,Obey ou JonOne (JonOne qui fût également soutenu par Agnès.B). Certaines galeries se spécialisent même dans l'urban art, comme Studio 55, dans le 15e arrondissement, qui soutient les graffeurs français. Des institutions majeures présentent des expositions de graffs, comme TAG au Grand Palais, au printemps 2009, ou Né dans la rue à la Fondation Cartier en automne 2009.

A venir plusieurs articles sur les grands du monde du Street Art, à vos claviers pour nous livrer vos impressions !

Chloé

mercredi 30 novembre 2011

Quel avenir pour le marché de l'art en France ?

Inciter les entreprises et les particuliers à constituer une collection. C’est l’objectif phare du plan pour le renouveau du marché de l’art français lancé par Christine Albanel, le 2 avril 2008.
«Les enjeux du marché de l'art sont multiples pour la France. Il constitue un véritable vecteur de croissance économique puisque plus de 50 000 emplois et près de 10 000 entreprises sont concernés.»
Il contribue également au rayonnement culturel international de notre pays. C'est aussi le support de la diffusion des créateurs et le moyen pour ceux-ci de vivre du produit de leur travail. Enfin, les lieux du marché de I'art sont également ceux de la rencontre du public avec les œuvres, comme en témoignent les 100 ~ 000 visiteurs de la Biennale des antiquaires, les 80 ~ 000 visiteurs de la Fiac et les millions de Français qui fréquentent les brocantes, foires et salons.
Le premier axe consiste à faire en sorte que la France compte davantage de collectionneurs, particuliers ou entreprises :
En faveur des particuliers, sera mis en place un mécanisme de prêt sans intérêt, financé par une banque partenaire qui sera le mécène et le relais de l'opération auprès du grand public. Ce dispositif s'inspire du programme anglais "Own Art", lancé en 2004, qui a rencontré un grand succès, notamment auprès des classes moyennes, en favorisant l'achat d'une première œuvre par des milliers de Britanniques et qui a fait école aux Pays-Bas.
En faveur des entreprises, une réflexion interministérielle sera engagée pour que les PME et les entreprises individuelles, actuellement exclues, de fait, du régime fiscal du mécénat lorsqu'elles achètent les œuvres d'artistes vivants, puissent y accéder.
Le second axe du plan consiste à améliorer la compétitivité du marché de l'art français et de ses acteurs :
  • En premier lieu, la réglementation nationale applicable aux maisons de ventes sera allégée et modernisée, dans le cadre de la transposition en cours de la directive "Services". Ainsi le régime d'agrément préalable des maisons de ventes laissera la place à une simple déclaration, sans réduire pour autant la protection des acheteurs et des vendeurs.
A l'instar de leurs homologues européennes, les maisons françaises disposeront de la possibilité d'offrir un minimum garanti aux vendeurs, de réaliser des ventes de gré à gré ou encore de vendre des œuvres dont elles seraient propriétaires.
Enfin l'extension récente de la taxe dite "sur les arts de la table" sera abrogée ; les contraintes déclaratives imposées aux acteurs du marché de l'art pour un prélèvement qui représente 0,2 % du chiffre d'affaires concerné sont disproportionnées et contre-productives.
  • En deuxième lieu, le cadre réglementaire européen sera aménagé. D'abord, l'application du droit de suite aux œuvres des artistes décédés devra se faire selon des modalités harmonisées entre les différents États membres. A cet effet, la France saisira la Commission européenne afin de pouvoir bénéficier, dans les mêmes conditions que le Royaume-Uni notamment, de l'application du droit de suite aux seules œuvres des artistes vivants.
La TVA à l'importation, appliquée à l'entrée de l'Union européenne et qui peut contribuer à détourner les ventes vers des places comme New York ou Genève au détriment des professionnels européens, sera examinée dans le cadre de la réflexion lancée par la France, au niveau communautaire, sur le taux réduit applicable aux biens culturels.
Enfin, de nombreuses mesures simples et concrètes permettront de mieux connaître le marché de l'art et d'améliorer la sécurité des professionnels.

Aude

mardi 29 novembre 2011

Chiharu Shiota : le coup de coeur

Chiharu Shiota est une artiste japonaise née en 1972 à Osaka et aujourd'hui établie à Berlin.
« J’ai commencé par la peinture. Ensuite, j’ai voulu peindre l’air en trois dimensions, avec du fil noir de préférence comme un trait de crayon »
 « Nous sommes tous pris dans un réseau de contraintes, liées à notre nationalité, notre famille, etc. Créer est, pour moi, un moyen de me libérer. »


Discrète et silencieuse, Chiharu Shiota interroge avec ses installations sorties tout droit des contes japonais. Œuvre quelque peu inquiétante, comme ces récits fabuleux peuplés de fantômes et d'objets mystérieux.



Depuis le milieu des années 90, Chiharu Shiota fait sa signature de ses installations aux fils entrelacés. Tendant des fils épais de laine noirs aux murs, sols et plafonds, elle crée des réseaux graphiques impressionnants. Ces toiles gigantesques, ses œuvres entre performances artistiques et installations spectaculaires, enveloppent très souvent des objets de son quotidien : chaises, lits, pianos, vêtements, valises, lits, ou encore jouets, comme si l’artiste essayait, en les retenant prisonniers dans sa toile, de conserver la trace de ces objets qui menacent de disparaître de sa mémoire.

Les fils de laine s’apparentent à des traits de crayon dessinés dans l’espace, dont l’accumulation fait écran à la vision du visiteur, tout en donnant à l’œuvre une dimension sculpturale impressionnante. Invité à pénétrer dans l’installation, le visiteur a l’impression d’avancer dans la matérialisation d’une image mentale.
d’autres objets plus troublants, liés à sa vie lits d’hôpital, instruments médicaux, bocaux contenant son propre  sang… Elle explore ainsi la relation entre passé et présent. À cela s’ajoute parfois une dimension onirique par le tissage de véritables toiles d’araignées complexes et impénétrables, généralement en cordelette noire, parfois aussi rouge.

L’installation matérialise un questionnement souvent présent dans le travail de l’artiste : quels souvenirs matériels et psychiques conserve-t-on de son passé ? Les souvenirs nous construisent-ils ou nous empêchent-ils d’avancer ? Elle le confirme, cette toile d'araignée la protège.
Louise Bourgeois a bien baptisé son énorme sculpture d'araignée Maman.
œuvre à la fois douceur et mélancolie, sourde menace et folle sensualité
Elle a débuté sa carrière avec une pratique  performative intense. Inspirée par le Body Art et l’art  féministe d’artistes comme Louise Bourgeois, Eva Hesse ou encore Rebecca Horn, elle réalise des actions fortes traitant des complexités de  l’expérience féminine, de l’exil et de la notion de foyer. Aujourd’hui, elle  déploie une œuvre sculpturale et spatiale privée de la figure humaine. Elle propage, croise et noue, du fil  noir ou rouge, toujours monochrome, entêtant et extrêmement présent. Il n’est  pas étonnant que sa pratique soit souvent associée au mythe d’Arachné, une  tisseuse hors pair qui, après son suicide fut métamorphosée par Athéna en  araignée condamnée à tisser sa toile de manière perpétuelle. De son ventre, l’araignée extirpe le fil fragile avec lequel elle constitue patiemment sa toile  pour se nourrir.


Le plus : actuellement chez TEMPLON l’installation Infinity (30 Rue Beaubourg 75003 Paris)

Cette artiste étrange, féérique pour les uns, cauchemardesque pour les autres, est à Paris. Étonnamment silencieuse, la jeune femme très concentrée a œuvré (avec deux assistants) pour transformer l'espace de la galerie en forêt noire où brillent doucement, de façon aléatoire, de grosses ampoules rondes. Ces symboles de la vie qui palpite rappellent Christian Boltanski et son théâtre de la mémoire. En quelques jours, l'espace chavire sous son intervention. Voir, au premier jour, les quelques fils agrafés sur le mur est intriguant. Voir se bâtir cette toile symbolique qui crée l'œuvre et l'émotion est aussi fascinant qu'un tour de magicienne. farouche et personnelle,

Dès le premier pas, nous pénétrons dans  l’univers mystérieux et saisissant de Chiharu Shiota. Du sol au plafond,  l’artiste a déployé sa toile de laine noire, une toile graphique qui vient  dessiner et composer l’espace. Il nous faut nous immiscer et trouver notre  propre chemin le long de cette œuvre dans laquelle nous ne pouvons pénétrer. Un  jeu d’ombres et de lumières s’installe entre la faible luminosité produite par  les ampoules, celle de la galerie et les fils qui viennent rompre le flux  lumineux. Les ampoules sont comme prises au piège dans la toile, tels des  insectes lumineux pris dans la toile d’une araignée qui tisse pour les engluer  et les capturer. Piégées ou protégées ? Un sentiment double nous assaille :  piège ou cocon, peur et attirance, malaise et fascination, inconfort et  enchantement. Une dichotomie également due à la distance instaurée entre le  spectateur et l’œuvre, celle-ci lui est toujours inaccessible. Sommes-nous  véritablement invités ? Chacun de ses environnements est emprunt d’une solitude  et d’une vie intérieure intense qu’il est difficile d’approcher. Chiharu Shiota  autorise une contemplation et se refuse à toute intrusion extérieure.


« La création de fils est le reflet de mes propres  sentiments. Un fil peut être remplacé par le sentiment. Si je tisse quelque  chose et qu’il se révèle être laid, tordu ou noué, tels doivent avoir été mes  sentiments lorsque je travaillais »
 « Pour moi, le fil est mon matériel,  j’utilise ce matériau car il reflète les sentiments. Ainsi, ils peuvent se  mélanger ou se nouer, se desserrer ou se couper. Comme des liens de sentiments. »
 « Je veux  être plus qu’un langage. Je veux lier le corps à l’univers. Je recherche le  moyen de connecter mon corps à l’univers. » 
Les installations filaires de Chiharu Shiota s’avèrent être les fruits de performances intimes, laborieuses et  produites à l’abri des regards extérieurs. En cela, l’artiste est toujours  présente dans son travail, ses environnements sont compris comme des scènes  qu’elle vient discrètement de quitter. Le spectateur, lui, vient constater son  passage pour y déceler ses messages, ses désirs et ses peurs. Elle mène un  douloureux combat contre le temps et produit une œuvre qui se veut être une  survivance d’une mémoire personnelle, intime et pourtant universelle. À travers  ses codes et symboles nous y retrouvons une part de notre histoire et de notre  expérience. Une mémoire dont elle s’impose la conservation, la protection et le  partage via une œuvre à la fois spectaculaire et  intime.

Bénédicte